En milieu marin, 57% des familles présentes au Permien disparaissent dans le Trias. Certaines extinctions débutent dans le Permien, d’autres ont lieu à la limite Permien-Trias (LPT).
Les taux évalués de disparitions :
Il ne reste qu'une famille au Permien moyen. C'est donc une extinction graduelle et un coup de grâce à une classe en fin de vie.
Tout comme pour les trilobites*, il s'agit également d'une extinction graduelle avec un coup de grâce à la LPT.
Les rugueux et les tabulés disparaissent complètement et brutalement. Pour ce groupe c'est un événement brutal.
Les goniatites* vont disparaitre à la LPT.
Les orthoceratides* (céphalopodes déroulés) s'éteindront au Trias inférieur.
Les Orthida (brachiopodes articulés) vont disparaitre.
Après un goulot d'étranglement à la LPT, les brachiopodes se redéveloppent au cours du Trias.
Les crinoïdes* montrent un passage en goulot d’étranglement. 42 familles disparaissent, soit 98% et un seul genre survit au Trias.
Chez les échinides*, seul le genre Miocidaris survit et assure la descendance de tous les échinides méso-cénozoïques.
Chez les radiolaires*, la brutalité de l’événement reste à prouver. Après un arrêt de la sédimentation siliceuse au Trias basal, l'explosion de la biodiversité de ce groupe au cours du Trias inférieur est beaucoup plus spectaculaire que les extinctions se produisant au sommet du Permien.
La productivité phytoplanctonique* a brutalement chuté comme le montre la baisse du rapport 13C/12C :
On retrouve les gastéropodes* au Trias moyen. C’est l’exemple type de ce que l’on nomme l’effet « Lazare »*
Voici d'autres sites à visiter pour en savoir plus (autres langues) :
www.uoregon.edu/~gregr/Paleoclasses/syllabus.htmlLes petits vertébrés sont moins touchés. Les reptiles d’eau douce ne sont pas affectés et se diversifient.
L’extinction en masse de la limite P/T est nette et intense, surtout en domaine marin.
Des arguments en faveur d’extinctions graduelles dans le Permien supérieur et le Trias inférieur s’accumulent.
Mais d’autres indices évoquent un épisode catastrophique.
Il convient donc d’analyser les évènements globaux susceptibles d’avoir causé l’extinction biologique.
Il n’y a pas de chute d’impact prouvée :
La meilleure hypothèse pour expliquer l’origine de cette régression* est un arrêt de
l’expansion océanique pendant environ 20Ma au cours du Permien.
- Les systèmes d’expansion océanique paléozoïque et mésozoïque sont séparés par une sorte de "temps mort"
dans l’activité mantellique.
- L'effondrement du plancher océanique induit un tecto-eustatisme* négatif.
- Les calculs géophysiques montrent qu’un arrêt de l’expansion donc de l’activité des dorsales,
pendant 10Ma entraîne une augmentation de 6% du volume des bassins océaniques.
L'augmentation de la surface des continents va produire des modifications climatiques, l'érosion et l'oxydation du carbone et l'élévation du CO2. Il y a disparition des nombreux groupes benthiques* néritiques* et chute de la biomasse*.
La fin de la formation de la Pangée* donne un super-continent, dont la surface est accrue par la grande régression. Lorsque les continents se réunissent, il a perte de l'habitat des plateaux continentaux. Cette continentalisation entraîne la dégradation climatique par suppression de l’effet tampon des océans. Des températures élevées, des alternances saisonnières marquées et des tempêtes fortes marquent le climat de la fin du Permien. La Pangée* migre vers le Nord de 15° de latitude du Permien au Trias. Ceci va accentuer l’augmentation de température sur une grande partie du super-continent.
Entre le Carbonifère moyen et le Trias supérieur, le climat va changer du tout au tout. Un climat avec glaciation va laisser place à un climat aride sans glaciation ni gradient latitudinal.
Dans l’hémisphère Nord, les argilites et charbons du Carbonifère supérieur – Permien inférieur sont remplacés par les séries détritiques rouges de type semi-aride. Dans le Sud de l'Oural, par exemple, le Permien supérieur et le Trias sont représentés par des milliers de mètres de sédiments rouges.
Au sud du Gondwana*, une grande glaciation est à son maximum au Carbonifère supérieur. Au Permien inférieur, la glaciation persiste sous forme de calottes plus modestes et associées à des glaciers d’altitudes. Des dernières traces de glaciation subsistent jusqu’à 7Ma avant la fin du Permien en Australie.
La disparition des glaciers modifie complètement le système de circulation océanique en supprimant
les eaux froides de fond au Trias, avec disparition de la psychrosphère.
L'océan actuel est stratifié en deux couches :
- Une couche supérieure à température variable dite thermosphère*
- Une couche inférieure à température constante 4-6°C dite psychrosphère*
Ces deux couches sont séparées par la thermocline* (200-500m). La hauteur de la thermocline varie en fonction de
la latitude (elle remonte vers les hautes latitudes) et les saisons (elle remonte en hiver).
La psychrosphère* est alimentée en eaux froides par les calottes glaciaires. La psychrosphère
n'a pas toujours existé au cours des temps géologiques, puisque directement liée aux glaciations.
On parle de paléopsychrosphère* pour les périodes anté-Jurassique. La paléopsychrosphère* a fonctionné deux fois avant l'actuel.
La première, à l'Ordovicien et la seconde au cours du Carbonifère – Permien.
La psychrosphère* actuelle débute au cours du Tertiaire inférieur.
Les dernières faunes paléopsychrosphériques reconnues sont de l’extrême base du Trias moyen.
Les ostracodes sont d'excellents marqueurs de l'existence de la psychrosphère*.
En effet, ces micro-crustacés présentent des morphologies tout à fait particulières en milieu profond :
- une grande partie de la faune est archaïque, primitive;
- les changements phylomorphogénétiques sont très lents (comparés aux faunes d'eau peu profonde);
- les faunes sont homogènes sur de très grandes distances;
- la plupart ont des tests très fins;
- quelques espèces sont plus grandes que les formes d'eau peu profonde;
- beaucoup d'espèces sont lisses ou possèdent de longues épines.
Les sculptures en rides fortes, fréquentes en milieu néritique sont ici absentes;
- les tubercules oculaires manquent;
- le nombre d'espèces est toujours faible;
- les charnières sont primitives.
Ces caractères sont valables pour toute la tranche de temps. Il est donc relativement aisé de déterminer l'existence de la psychrosphère* dans les séries stratigraphiques par la présence d'ostracodes psychrosphériques* ou de leurs équivalents paléozoïques (ostracodes* paléopsychrosphériques*). Par cette méthode, on peut reconstruire l'histoire de la psychrosphère*.
Tous les modèles conduisent à voir une évolution vers l’aridité.
Dès la limite Permien – Trias, le climat devient plus continental avec des étés très chauds et des hivers très froids.
Des circulations de méga-moussons, fonctionnant toute l’année, amènent des fortes précipitations sur
la bordure orientale de la Pangée.
Le réchauffement excessif des mers au Trias inférieur favorise les eaux dysoxiques* (les eaux chaudes ne
dissolvent pas bien l'oxygène).
Outre les variations orbitales de la terre qui constituent probablement la cause principale de si grands bouleversements climatiques, des évènements géologiques vont appuyer ces tendances : la formation finale de la Pangée et la dérive des continents vers le Nord et l'élévation du taux de CO2 atmosphérique (voir ci-dessous).
Les bassins épicontinentaux subsidents*, situés en zones climatiques chaudes, sont le siège de dépôts évaporitiques épais, dus à l'évaporation des mers intérieures abandonnées par la régression*. Ce sont de gigantesques pièges à sels, prélevés sur le stock de sels des océans. Le ralentissement de l’expansion océanique (voir plus haut), voire son l’arrêt, n’a pas permis de combler ce manque. Les calculs évaluent la baisse de salinité des eaux marines à 10°/°°.
Vers 250Ma, se produit le volcanisme très important des trapps de Sibérie.
Il s'agit d'un empilement de coulées stratoïdes de basalte tholéïtique* dus à un volcanisme fissural.
La surface est de 1,5.106 km2 à l'affleurement; on estime que la superficie initiale était probablement
de 4.106km2. L'épaisseur est de 3700m ce qui représente plus de 3 millions de km3 sortis au cours de
11 phases éruptives.
La durée de ce volcanisme est inférieure à 1Ma.
En Chine du Sud existe, juste sous la LPT, un niveau volcanique provenant d’éruptions pyroclastiques* de zones de subductions. Le volume est estimé à 100Km3. Avec la reprise de l’expansion océanique dès le Permien terminal, l’activité des zones de subductions reprend.
Ces subductions* existent sur le pourtour de la Pangée* (lignes rouges sur la carte ci-dessous) et ce volcanisme, observé seulement en Chine, est sûrement très sous-estimé.
Dans un premier temps les cendres ont obscurci le ciel, ce qui a conduit à un refroidissement à court terme.
D'énormes quantités de SO2 et d’aérosols sulfatés ont été relâchées et ont causé des pluies acides.
Ceci a très certainement affecté les végétaux supérieurs et les insectes.
Le CO2 associé à tout volcanisme produit un effet de serre qui conduit à un réchauffement à long terme de 4 à 5°C.
Une élévation de température de 5°C n'est pas suffisante pour expliquer l'ampleur des extinctions,
mais l'augmentation de 5° de la température de l'eau des océans va déstabiliser les gaz instables.
La matière organique se dépose sur les fonds océaniques et est incorporée dans les sédiments.
Sous l'action des bactéries anaérobies, la matière organique se transforme en méthane dans les premières centaines
de mètres de la pile sédimentaire. Un volume très important de méthane est ainsi produit.
Dans une fourchette bien définie de température et de pression, une partie de ce méthane se combine aux molécules
d'eau pour former de l'hydrate de gaz.
Sous des pressions et températures particulières, la glace (H2O) peut former une sorte de cage emprisonnant
les molécules de gaz. On appelle les composés résultants des hydrates de gaz ou clathrates.
Le principal clathrate est l'hydrate de méthane. Il est souvent désigné sous le terme de "glace qui brûle".
Les clathrates ne sont stables que dans des fourchettes de température et de pression précises et constantes, ce qui explique qu'on les trouve au niveau du talus continental* et dans les pergélisols* aux hautes latitudes.
Si la température augmente de quelques degrés, les clathrates "fondent" et relâchent le méthane.
On estime qu'un volume de clathrate libère 160 volumes de gaz libre.
Une telle relâche de gaz induit un effet de serre. Cet effet de serre va augmenter la température de 5°C supplémentaires.
Cette élévation de température s'additionne à celle due au volcanisme.
On peut donc estimer que l'élévation de température résultante est de l'ordre de 10°C, ce qui devient
préjudiciable à toute forme de vie.
L'océan est en équilibre chimique lorsqu'aucun événement particulier ne vient troubler son ordonnancement. La chimiocline* est l'interface existant entre différentes couches d'eau, lorsque celles-ci ne se mélangent pas. Cela implique donc qu'il existe un équilibre entre les différentes couches d'eau. En général, les couches d'eau de surface sont plus oxygénées que les couches plus profondes, puisqu'elles sont alimentées par l'atmosphère. L'anoxie* des couches inférieures peut être provoquée par la production importante de sulfure d'hydrogène par des micro-organismes benthiques.
A la base du Trias, une transgression rapide et spectaculaire se met en place.
Sur quelques milliers d’années va se produire une remontée de la mer de plus de 20m (en vertical).
La teneur en O2 est très faible dans toutes les mers épicontinentales.
Des faciès réducteurs apparaissent (shales noirs ou micrites à cristaux de pyrite).
Le Trias basal fut un temps d’asphyxie brutale des dernières communautés encore diversifiées (coraux).
Ne subsiste que des associations peu diversifiées à Claraia, Lingula et ostracodes Palaeocopes.
Le manque d’oxygénation des eaux durant tout le Trias inférieur est sûrement la raison majeure du retard de la reconquête.
La lenteur de la récupération post événementielle est une des caractéristique de la crise du Permien – Trias.
Pour expliquer les événements de la limite Permien –Trias, il n’y pas une cause unique mais une sommation et une conjonction de causes pour expliquer la plus grande crise biologique de tous les temps. C'est le "crime de l'Orient Express".
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