La crise du Permien – Trias (-251Ma)

La biosphère* subit sa plus grande crise au cours des temps phanérozoïques*

En milieu marin, 57% des familles présentes au Permien disparaissent dans le Trias. Certaines extinctions débutent dans le Permien, d’autres ont lieu à la limite Permien-Trias (LPT).

 Variation du nombre de familles marines au cours des temps géologiques
Variation du nombre de familles marines au cours des temps géologiques.

Le milieu marin

Les taux évalués de disparitions :


Les groupes qui disparaisent complétement



Les groupes atteints par l'extinction sans disparaître



Le milieu continental



Conclusion sur les données

L’extinction en masse de la limite P/T est nette et intense, surtout en domaine marin.
Des arguments en faveur d’extinctions graduelles dans le Permien supérieur et le Trias inférieur s’accumulent.
Mais d’autres indices évoquent un épisode catastrophique.
Il convient donc d’analyser les évènements globaux susceptibles d’avoir causé l’extinction biologique.



Les événement globaux à la limite Permien - Trias

Il n’y a pas de chute d’impact prouvée :




Les principales causes évoquées dans les événements de la LPT sont (chronologiquement) :


  1. Régression et formation de la Pangée au Permien supérieur
  2. Changement climatique au Permien supérieur
  3. Baisse de la salinité au Permien supérieur
  4. Volcanisme à la limite PT
  5. Relâche de gaz (H2S – CH4) au Trias basal
  6. Transgression avec dysoxie au Trias basal


Détail :



  1. Régression et fermeture de la Pangée au Permien supérieur


  2. Changement climatique au Permien supérieur
  3. Entre le Carbonifère moyen et le Trias supérieur, le climat va changer du tout au tout. Un climat avec glaciation va laisser place à un climat aride sans glaciation ni gradient latitudinal.

     Modifications du climat au cours des temps géologiques
    Modifications du climat au cours des temps géologiques.

    Données de faciès

    Dans l’hémisphère Nord, les argilites et charbons du Carbonifère supérieur – Permien inférieur sont remplacés par les séries détritiques rouges de type semi-aride. Dans le Sud de l'Oural, par exemple, le Permien supérieur et le Trias sont représentés par des milliers de mètres de sédiments rouges.

     Séries rouges du Permien supérieur et du Trias dans le Sud de l'Oural
    Séries rouges du Permien supérieur et du Trias dans le Sud de l'Oural.

    Au sud du Gondwana*, une grande glaciation est à son maximum au Carbonifère supérieur. Au Permien inférieur, la glaciation persiste sous forme de calottes plus modestes et associées à des glaciers d’altitudes. Des dernières traces de glaciation subsistent jusqu’à 7Ma avant la fin du Permien en Australie.

     Position des derniers glaciers au Permien supérieur (d'après Lethiers, 1998)
    Position des derniers glaciers au Permien supérieur (d'après Lethiers, 1998).

    La disparition des glaciers modifie complètement le système de circulation océanique en supprimant les eaux froides de fond au Trias, avec disparition de la psychrosphère.

    L'océan actuel est stratifié en deux couches :
    - Une couche supérieure à température variable dite thermosphère*
    - Une couche inférieure à température constante 4-6°C dite psychrosphère*

    Ces deux couches sont séparées par la thermocline* (200-500m). La hauteur de la thermocline varie en fonction de la latitude (elle remonte vers les hautes latitudes) et les saisons (elle remonte en hiver).
    La psychrosphère* est alimentée en eaux froides par les calottes glaciaires. La psychrosphère n'a pas toujours existé au cours des temps géologiques, puisque directement liée aux glaciations.
    On parle de paléopsychrosphère* pour les périodes anté-Jurassique. La paléopsychrosphère* a fonctionné deux fois avant l'actuel. La première, à l'Ordovicien et la seconde au cours du Carbonifère – Permien. La psychrosphère* actuelle débute au cours du Tertiaire inférieur.
    Les dernières faunes paléopsychrosphériques reconnues sont de l’extrême base du Trias moyen.



     Evolution de la psychrosphère au cours des temps géologiques (d'après Lethiers, 1998)
    Evolution de la psychrosphère au cours des temps géologiques (d'après Lethiers, 1998).

    Données des faunes d'ostracodes*

    Les ostracodes sont d'excellents marqueurs de l'existence de la psychrosphère*.

    En effet, ces micro-crustacés présentent des morphologies tout à fait particulières en milieu profond :
    - une grande partie de la faune est archaïque, primitive;
    - les changements phylomorphogénétiques sont très lents (comparés aux faunes d'eau peu profonde);
    - les faunes sont homogènes sur de très grandes distances;
    - la plupart ont des tests très fins;
    - quelques espèces sont plus grandes que les formes d'eau peu profonde;
    - beaucoup d'espèces sont lisses ou possèdent de longues épines. Les sculptures en rides fortes, fréquentes en milieu néritique sont ici absentes;
    - les tubercules oculaires manquent;
    - le nombre d'espèces est toujours faible;
    - les charnières sont primitives.


     Exemples d'ostracodes paléopsychrosphériques du Dévonien 
			(à gauche) et du Trias basal (au centre et à droite)
    Exemples d'ostracodes paléopsychrosphériques du Dévonien (à gauche) et du Trias basal (au centre et à droite).

    Ces caractères sont valables pour toute la tranche de temps. Il est donc relativement aisé de déterminer l'existence de la psychrosphère* dans les séries stratigraphiques par la présence d'ostracodes psychrosphériques* ou de leurs équivalents paléozoïques (ostracodes* paléopsychrosphériques*). Par cette méthode, on peut reconstruire l'histoire de la psychrosphère*.



    Les modèles climatiques

    Tous les modèles conduisent à voir une évolution vers l’aridité.

    Dès la limite Permien – Trias, le climat devient plus continental avec des étés très chauds et des hivers très froids.
    Des circulations de méga-moussons, fonctionnant toute l’année, amènent des fortes précipitations sur la bordure orientale de la Pangée.
    Le réchauffement excessif des mers au Trias inférieur favorise les eaux dysoxiques* (les eaux chaudes ne dissolvent pas bien l'oxygène).


     Modèle climatique montrant les températures calculées très élevées à la LPT
    Modèle climatique montrant les températures calculées très élevées à la LPT (www.nsf.gov/news)

    Les causes du changement climatique

    Outre les variations orbitales de la terre qui constituent probablement la cause principale de si grands bouleversements climatiques, des évènements géologiques vont appuyer ces tendances : la formation finale de la Pangée et la dérive des continents vers le Nord et l'élévation du taux de CO2 atmosphérique (voir ci-dessous).



  4. Baisse de la salinité
  5. Les bassins épicontinentaux subsidents*, situés en zones climatiques chaudes, sont le siège de dépôts évaporitiques épais, dus à l'évaporation des mers intérieures abandonnées par la régression*. Ce sont de gigantesques pièges à sels, prélevés sur le stock de sels des océans. Le ralentissement de l’expansion océanique (voir plus haut), voire son l’arrêt, n’a pas permis de combler ce manque. Les calculs évaluent la baisse de salinité des eaux marines à 10°/°°.


     Répartition schématique des principaux dépôts évaporitiques au Permien supérieur
    Répartition schématique des principaux dépôts évaporitiques au Permien supérieur.



     Exemple d'organismes euryhalins des premiers niveaux du Trias
    Exemple d'organismes euryhalins des premiers niveaux du Trias.

  6. Le volcanisme


  7. Conséquences du volcanisme

    Dans un premier temps les cendres ont obscurci le ciel, ce qui a conduit à un refroidissement à court terme.
    D'énormes quantités de SO2 et d’aérosols sulfatés ont été relâchées et ont causé des pluies acides. Ceci a très certainement affecté les végétaux supérieurs et les insectes.
    Le CO2 associé à tout volcanisme produit un effet de serre qui conduit à un réchauffement à long terme de 4 à 5°C. Une élévation de température de 5°C n'est pas suffisante pour expliquer l'ampleur des extinctions, mais l'augmentation de 5° de la température de l'eau des océans va déstabiliser les gaz instables.



  8. Relâches de gaz (méthane CH4 et sulfure d'hydrogène H2S) au Trias basal


  9. Transgression avec dysoxie
  10. A la base du Trias, une transgression rapide et spectaculaire se met en place.
    Sur quelques milliers d’années va se produire une remontée de la mer de plus de 20m (en vertical).
    La teneur en O2 est très faible dans toutes les mers épicontinentales.
    Des faciès réducteurs apparaissent (shales noirs ou micrites à cristaux de pyrite).



    Causes :


    Le Trias basal fut un temps d’asphyxie brutale des dernières communautés encore diversifiées (coraux).
    Ne subsiste que des associations peu diversifiées à Claraia, Lingula et ostracodes Palaeocopes.
    Le manque d’oxygénation des eaux durant tout le Trias inférieur est sûrement la raison majeure du retard de la reconquête. La lenteur de la récupération post événementielle est une des caractéristique de la crise du Permien – Trias.


     Récupération post-événementielle



Conclusion

Pour expliquer les événements de la limite Permien –Trias, il n’y pas une cause unique mais une sommation et une conjonction de causes pour expliquer la plus grande crise biologique de tous les temps. C'est le "crime de l'Orient Express".


Synthèse sur la crise Permien - Trias :

 ...

Retour en haut de page


2008, Tous droits réservés.